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Focus

SwampDiggers’ Awards 2016

La sélection annuelle de la rédaction

La rédaction, le 27 décembre 2016

Nos alligators se sont réunis pour célébrer l’année 2016.

En matière de boxe, il existe une seule catégorie pour les armoires à glace : la catégorie poids lourds. Mais, dans le rap, ces poids-lourds se séparent en deux scènes. D’abord, ceux que les mamans branchées, Konbini et les joueurs de football connaissent. Et ils n’ont pas vécu une très grande année, que ce soit un Kanye West qui s’est mangé trop d’uppercuts dévastateurs par la foule et son psychisme, un Kendrick Lamar sans (vrai) projet ou un Drake dont l’album Views a pas mal déçu, entre autres. Ce qui eut pour conséquence de permettre aux frères Klitschko 2.0 (Swae Lee et Slim Jxmmy) de venir se tailler une sacrée part dans le grand gâteau du mainstream.

Puis, l’autre scène, celle des poids lourds qui combattent dans de sombres hangars où se côtoient rats, crack money, parieurs sous Hennessy et billets moites, bref : les héros de la rue. Et cette scène là a vécu une riche année. D’abord, les valeurs sûres sont restées sûres : son Mohamed Ali, sorti de prison surentraîné, n’a eu besoin que de sept ou mois pour gagner une dizaine de combats ; l’ami PeeWee De la Hoya a continué de briser assez d’arcades pour avoir ses entrées dans toutes les traphouse qui se respectent ; Juicy J continue sa métamorphose en Jeannie Longo des rings. Puis, une ribambelle de jeunes excités a commencé à combattre : des anciens poids-plumes, welters, mi-lourds qui, suite à une cure de protéines, ont tenu à rappeler que eux aussi méritaient de faire couler le sang sur le plus beau des rings. Tout en n’empêchant pas les originaux, qu’ils soient des rigolos ou des âmes en peine, de combattre joyeusement.

Alors, ce beau bordel méritait bien une cérémonie, où les plus marquants d’entre toutes ces gueules cassées récupéreront leur award, en récompense d’un jab, d’un combat, d’une année, d’une carrière. Vous voilà les bienvenues aux SwampDiggers’ Awards 2016.

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Grand Prix 2016

 

Peewee Longway – Pour l’ensemble de son œuvre

Master Peewee – The Blue Leprechaun Saison 1 Episode 1

L’Histoire raconte que Master Peewee, célèbre magicien des palaces de Vegas, fut changé en statut de pierre à l’issue d’un tour mal maîtrisé. Par précaution, on entreposa son corps ainsi que son chaudron rempli d’or, accessoire indispensable de son personnage de gnome irlandais, dans l’arrière-boutique d’un minable prêteur sur gage.
Les années passèrent, jusqu’au jour où une bande de jeunes curieux et mal intentionnés subtilisa le butin de Peewee avec l’espoir de le faire fructifier au bandit manchot. Sa colère fut alors si féroce qu’elle brisa la malédiction et lui redonna forme humaine. Dès lors, l’excentrique créature n’aura qu’une idée en tête : de motels en tables de black-jack, de dinners en strip clubs, il va tout mettre en œuvre pour récupérer son or et mener à bien sa sanglante vengeance dans la cité du vice.
Connaissant son légendaire sens du spectacle, il y aura forcément de la magie dans l’air. (Jocelyn Anglemort) (Illustration : rimrimrim)

Peewee Longway en 2016 :
  Mr. Blue Benjamin (album)
  Money, Pounds, Ammunition Vol. 3 (MPA mixtape)
  Longway Sinatra (mixtape en collaboration avec Cassius Jay)


Les awards 2016 (première partie)

Voici les 18 premiers awards finement sélectionnés par notre équipe. Nos fervents combattants sont classés par ordre alphabétique pour ne privilégier personne.

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$uicideboy$ – Radical $uicide

Meilleure bande originale pour mettre fin à ses jours

Admettre que la seule issue pour échapper à l’extinction de la race humaine c’est de coloniser Mars est très évocateur du mal qui nous ronge. Et le constat ne sort pas d’une discussion de comptoir ni de la bouche d’un complotiste azimuté, mais de Stephen Hawking, le célèbre physicien anglais. 1000 ans, c’est le temps qu’il nous reste à vivre sur la planète bleue. Non seulement l’homme se propage et détruit comme un virus, mais il sera vraisemblablement son propre bourreau. Belle performance. Et quand on pense à ce paradoxe cynique, impossible de pas penser aux $uicideboy$. Le duo excelle quand il s’agit d’utiliser le champ lexical du suicide et de la fin des temps. EP puissant doté de seulement 5 titres, Radical $uicide récolte donc l’award de la meilleure bande originale pour mettre fin à ses jours. (Mugen le Druide)


21 Savage

Award du futur roi déchu du rap

S’il y a bien une personne qui n’a pas d’ambition, c’est Herbert de Vaucanson. Ce canard anthropomorphe, l’un des personnages principaux de la bande dessinée Donjon se voit d’ailleurs confisquer son coeur au début de l’histoire. Commençant au plus bas de l’échelle, il finit par devenir, presque par hasard, le "Grand Khân". Contrôlé par une entité maléfique, il perd tous ses amis. Un vilain petit canard qui, comme 21 Savage, a arraché une couronne dont il ne voulait pas.

Il faut dire que le rappeur a réalisé l’exploit de marquer 2016 avec pour seul projet un EP de 9 tracks avec Metro Boomin. Si 2015 était réellement son année, avec la sortie de trois solides premiers projets, c’est cette année qu’il en a récolté les fruits.
Insensible, sans concession, le rap de 21 Savage est aussi tranchant que le couteau qu’il a tatoué sur le front. Si ce dernier peut paraître monotone et froid pour un nouvel auditeur, c’est bien l’aura extraordinaire qui habite chaque track qui nous fait rester. 21 Savage sait aussi bien prendre le contrôle sur de la trap que sur une ambiance spatiale avec un certain rappeur canadien.

La constance et la progression qui semblent sans limite chez 21 Savage le placent sans hésiter comme l’un des futurs grands noms du rap. (George de la Maille)


23 Savage clashe 22 Savage qui clashe 21 Savage (etc.)

Award de la meilleure suite arithmétique de clashs

Dans ce rap jeu où l’originalité des pseudonymes laisse parfois à désirer, on ne saurait reprocher ce manque d’imagination à certains rappeurs sudistes tant cette logique de clash est à la fois absurde, improbable, fortement comique et potentiellement infinie.
Prévision pour 2017 : une myriade de jeunes rappeurs de l’hémisphère sud s’inspire de la suite de Fibonnaci pour créer leur patronyme, chacun arborant son propre symbole cabalistique tatoué sur le front. (Tis)


88 Rising - Diamonds

Award du clip le plus psychédélique

Vous avez peut-être entendu parler de 88 Rising, une équipe de production visant à promouvoir les artistes aux origines asiatiques sur le sol américain. Même si Keith Ape à eu des problèmes de copyright avec son titre It G Ma, remix de U Guessed It d’OG Maco, le coréen à réussi à faire son trou aux USA. Derrière lui, l’Asian Trap s’est donc mise en marche avec de nombreuses nations représentées : Indonésie (Rich Chigga), Corée du sud (Okasian), Chine (Higher Brothers), Japon (Kohh)... Leurs visuels sont généralement de grande qualité, mais celui de Diamonds de Keith Ape se démarque du lot, rappelant visuellement le clip Love x $ex x Dreams d’A$ap Rocky en plus lumineux, angoissant, torturé et fourmillant de détails. Immersif, onirique, intense : difficilement descriptible avec des mots. Comme un trip sous LSD. Merci LK pour la découverte. (Mugen le Druide)


Adamn Killa

Award du meilleur rappeur a cheval

Révélé au grand public grâce à ses collaborations avec le poupon nordique du rap jeu, Yung Lean, Adamn Killa a, en plus d’un excellent alias, prouvé qu’il n’était pas seulement un mec bizarre avec des dreads rouges et son prénom tatoué sur le front. Contrairement à la quasi totalité des rappeurs « en provenance de Soundcloud », le natif de Chicago développe un univers qui lui est propre, tant musicalement que visuellement.
Son flow s’apparente à une sorte de complainte chantonnée, régulièrement ponctué de ses gimmicks favoris (avec notamment le désormais classique « GADAMNNNN » ou le plus personnel « I am Adamn... »). Même si l’influence de Chief Keef est omniprésente, on ne devinerait pas forcément qu’ Adamn Killa est originaire de la capitale de l’Illinois. Moins violent que certain de ses concitoyens, Adamn est dans son monde, déroulant avec talent les différentes nuances de sa « flex music » futuriste et ultra-efficace.
Au compteur cette année, deux projet tout aussi plaisants à écouter l’un que l’autre, Back 2 Ballin The Mixtape, sorti en début d’année et Mr. 650 The Mixtape à la fin de l’été. Plutôt solitaire quand il s’agit de partager le micro, il semble davantage enclin à collaborer avec des producteurs soigneusement choisis comme en témoignent son excellent projet avec Dp Beats (le producteur révélé par Chief Keef) ou encore le très bon "Commas" sorti en fin d’année avec le talentueux Ryan Hemsworth à la baguette.
Malgré un univers assez particulier et froid, le travail d’Adamn Killa semble intéresser pas mal de monde, tant bien qu’il a finit par atterrir sur WORLDSTARHIPHPOP il y a quelques mois à l’occasion de la sortie du clip du morceau « Saddler ». En plus d’être un bon rappeur et de faire d’excellent choix de production, Adamn fait du cheval, entre deux rides en I8, autant dire que le garçon a de la ressource. (D.Kleinfeld)


Alkpote x Butter Bullets - Ténébreuse Musique

Ténébreux award de ceux qui aiment la polygamie et la Mauritanie

Attendu impatiemment par un grand nombre depuis le morceau Chiens (sorti en 2010), Alkpote et les Butter Bullets ont enfin exécuté les pas de la danse de la fusion pour donner le jour à une entité monstrueuse en début d’année. La créature hybride, accompagnée de Singe Mongol et d’une petite poignée d’autres rappeurs, s’est ensuite rendue sur l’Île de l’incantation pour réaliser quelques séances d’enregistrement durant des orgies fromagesques dans la Delacave.
De leurs vacances en enfer, ils ont envoyé à leur public une carte postale sous la forme d’un album aux ambiances à la fois sombres et aériennes, malsain comme Patrick Sébastien. Le trio, épaulé par des featurings de choix, nous invite à une valse des démons dont le décor oscille entre brasiers infernaux et vents glacials, pour ceux qui n’ont plus d’amour dans leur âme et le cœur froid comme un Mister Freeze. Sur des productions d’orfèvre signées Dela pour l’ensemble (exceptés No Limit par C-Sick et Déjà Mort par DJ Weedim & Chapo), Alkpote et Sidisid font couler les paroles crues et les rimes atroces à outrance, comme du fromage fondu sur des pommes de terre, jusqu’à ce que l’assiette déborde et qu’Olivier Machin vomisse. Mais le monde du rap a l’habitude que ces individus lui mènent la vie dure, et les gourmets les plus téméraires, ceux qui n’ont pas de limites comme Master P, sauront eux savourer la qualité du produit jusqu’à la dernière seconde de ces 14 titres.
Après 60 minutes à nous mettre en transe sur la piste de danse, l’entité hybride laisse derrière elle un monde en cendres, ainsi qu’un constat de la part de son public : ça a fait mal, mais il en redemande. Reste alors à souhaiter que cette créature démoniaque ait plus d’un tour dans son sac, et si 2016 était son année, pourquoi pas 2017 aussi ? Pour commencer en force, la Ténébreuse Clique ne vous laisse d’ailleurs pas le choix dans la date : rendez-vous ce 21 janvier. (Gho$tFrieza)


A$AP Mob - Money Man / Put That On My Set

Award du meilleur court-métrage

Money Man / Put That On My Set est un court-métrage de 12 minutes réalisé par Dexter Navy, A$AP Rocky et le collectif AWGE, servant de clip commun à ces deux titres jusque-là inédits, avec en featurings A$AP Nast, Yung Lord et Skepta, le pilier du Grime. Sur fond de belles images en noir et blanc au grain savoureux, la narratrice, Rina, nous conte son histoire se déroulant dans un univers imaginaire ou dans un futur proche. Sur fond de violence et de misère, elle y évoque le quotidien sombre des habitants d’une cité où la jeunesse vit de manière désabusée, ravagée par une drogue inquiétante fabriquée à base d’ailes de papillons et de venin de scorpions.
Si l’influence de La Haine de Mathieu Kassovitz est indéniable (noir et blanc, manière de filmer, ambiance 90s et présence de Saïd Taghmaoui jouant le caïd de la cité), on peut également penser à La Jetée de Chris Marker, notamment lors des premières minutes où la narration se superpose à un diaporama de photographies en noir et blanc et où la charge poétique de l’histoire et des images demeure très forte. L’évocation d’un monde désenchanté et dystopique n’y est pas pour rien non plus. Sous un ciel constamment moucheté de papillons virevoltant sans arrêt, les vendeurs de mort et leurs armes côtoient les enfants aux yeux devenus totalement noirs (effet de la drogue en question), sans échappatoire, sans retour en arrière possible, évoquant les personnages usés par la drogue fictionnelle du roman Substance Mort de Philip K. Dick. (Gho$tFrieza)


Apollo Brown & Skyzoo - The Easy truth

Award du meilleur disque "le boom-bap en 2016 c’est toujours bien"

Hormis quelques exceptions, 2016 fera figure pour les fans de boom-bap d’année où quelques ol’timers s’acharnent à sortir des albums 20 ans trop tard. La collaboration d’Apollo Brown, le producteur de Detroit, et de Skyzoo, le rappeur de New-York fait partie de ces exceptions. 15 titres alliant fond et forme, usant de samples bien sentis à une époque où le clearing n’est qu’une barrière supplémentaire à la production d’instrumentaux. La collaboration est fluide et semble profiter aux deux artistes tombés dans ce cercle vertueux. Enfin, même sur une incartade trap à l’occasion du morceau "The Vibes", l’alchimie est toujours là et ne dénote pas du reste de l’album. Assurément un disque majeur de 2016. (Tis)


Brodinski

Award du frenchie le plus connecté

Brodinski a fait ce dont rêve la plupart des passionnés de musique, il s’est rendu à la source de celle qu’il apprécie, en l’occurrence Atlanta. Avec son premier projet mêlant musique électronique et sonorités trap, Brava, et Sour Patch Kids qu’il a sorti cette année, Brodinski a prouvé que son approche de la scène locale était assez unique, ne serait-ce que dans le choix de ses collaborations (Bricc Baby, Bloody Jay, Johnny Cinco, HoodRich Pablo Juan, Yakki Divioshi ou encore l’oublié de GBE, SD, qui vient lui de Chicago).
Alors que certain français ont tendance à automatiquement se tourner vers des têtes d’affiche bankable de la scène US, quitte à laisser un peu de coté la dimension musicalement intéressante d’une collaboration, Brodi semble lui se focaliser uniquement sur ses propres goûts et sa vision de la musique qu’il veut faire lorsqu’il choisit ses collaborateurs. Cette volonté de réfléchir à comment créer quelque chose de nouveau a partir de ses influences clubs, electro et de la musicalité locale se ressent dans la manière dont il a réussi à créer en moins d’un an, en s’appuyant sur certaines sonorités, une atmosphère minimaliste et inquiétante qui lui est propre.
Par le biais de son label Bromance, il est cette année allé encore plus loin dans cette exploration de la scène locale en branchant son posse de producteurs affutés (Myth Syzer, Ikaz Boi, 8TM, MYD...) avec une écurie de jeunes pousses complètement inconnues du grand public, l’équipe YSL.
Résultat des comptes en cette fin d’année, deux très bons projets : celui de TWICE aka Lil Double Up, "Zachary" et le projet commun de tout le crew YSL, "Yung Slime Season". Nul doute qu’il se cache dans les rangs de cette bande certaines futures stars d’ATL et chapeau à Brodinski pour ne pas avoir emprunté le chemin de la facilité au détriment du cœur de cette audacieuse entreprise, la musique, bonne et nouvelle. There’s gonna be good times... (D.Kleinfeld)


E-40 - The D-Boy diary

Award des plus belles couleurs de couvre-chef sur une pochette

Le rappeur de Vallejo a encore frappé en 2016 et fidèle à ses habitudes a sorti un nouvel opus en plusieurs volumes. La figure tutélaire de la Bay Area a su une nouvelle fois s’entourer d’un grand nombre d’invités (Gucci Mane, Mozzy, G-Eazy, Mistah FAB, Nef The Pharaoh, etc.) sur des productions énergiques riches en basses, propres à accueillir son flow légendaire. Forcément, 44 titres c’est beaucoup (d’autant plus que le choix des thèmes traités n’est pas forcément nouveau ni diversifié) mais on en retirera quelques pépites, des choix vestimentaires fastueux (illustrés sur la pochette) et une longévité forçant clairement le respect. (Tis)


Germ – Bout It

Award du MIP : most improved player of the year / meilleure progression de l’année

Entre Pouya et Fat Nick, il y a un autre membre des Buffets Boys qu’il faut garder à l’oeil : Germ. Passé d’une vie de petit skateur lambda qui occupait ses journées en ridant les rues d’ATL ( et en buvant de la bière) à partie intégrante des Buffets Boys en un clin d’oeil, le parcours de Germ est pour le moin intriguant. S’il a commencé à rapper très récemment par hasard en squattant chez Fat Nick, le jeunot semblait être fait pour cette musique tant son flow semble être maîtrisé au millimètre. Il suffit d’écouter Bout It pour se rendre compte de son potentiel. À peine un an plus tard, le voilà perdu dans le bayou à une heure de route au nord de New Orleans, aux cotés des $uicideboy$. Une semaine après, le trio avait bouclé le violentissime EP Dirty Nasty Suicide. Petit Buffet Boy deviendra (vite) grand. (Mugen le Druide)


gin$eng - The Virus and Antidote Contest

Award de la production la plus déjantée de l’année

Produite à l’occasion du concours organisé par The Virus and Antidote, l’instrumentale a, sans surprise, raflé la mise. L’adolescent gin$eng n’a fait qu’une bouchée de la concurrence en tirant la quintessence d’une mélodie pourtant anodine. Sa 808-bass distordue à l’extrême, ses cymbales et les cris viscéraux ont retourné le cerveau de toute personne qui se respecte.
Mention honorable à PEARL WHITE pour son titre Rigger. (KallMeTheDoctor)


Griselda Records

Award du meilleur label pour t’habiller l’hiver

Crée en 2013 mais véritablement révélé en 2016, Griselda Records by Fashion Rebels (GXFR) s’est illustré comme un des labels les plus prometteurs au travers de 6 sorties remarquables cette année. Malgré une résidence à Atlanta, c’est la ville de Buffalo (NY) sur la Côte Est qui est mise à l’honneur et les productions transpirent cette géographie : le producteur Daringer excelle à la création d’instrumentaux aux BPMs lents et pesants, boucles hypnotiques épurées d’éléments rythmiques, cousues main pour de tragiques histoires de rue mâtinées de name-dropping de créateurs d’habits de luxe. Peu après la discrète connexion "Roses are red... So is blood" de WestsideGunn et du producteur londonien The Purist, est sorti le premier album "FLYGOD" du même WestsideGunn au flow si caractéristique, précédant de quelques mois "Don’t get scared now" et "There’s God then there’s Flygod pray both". S’ensuivront enfin une collaboration sans faux plis entre Conway et Prodigy, "Hell still on earth" en référence au titre culte de Mobb Deep, puis le quatrième volume de la série de mixtapes "Hitler wears Hermes". Enfin, le label (qui abrite également Tha God Fahim, Mach-Hommy et les producteurs Big Ghost Ltd et CamoflaugeMonk) a tissé son buzz au travers de la mise en vente en petites quantités d’un merchandising rapidement épuisé pour se retrouver à prix d’or sur les places de marché virtuelles. Dans la période actuelle où se démarquer des nouveaux artistes/labels émanant des recoins de l’Internet est devenu un véritable tour de force, force est de constater que Griselda Records a su sortir son aiguille du jeu... (Tis)


Gucci’s back bitch !

Award du meilleur come back du trapper préféré de ton trapper préféré

Avant son passage en prison, Gucci Mane était comme Boo dans sa première version : le ventre rond, pataud, mais quand même une des plus grandes forces de la galaxie. Avec sa peau chewing-gum, le trappeur aurait très bien pu rester collé sous une table de la prison de Terre Haute dans l’Indiana ; pourtant, il a su rebondir pour finalement atteindre la version finale de Boo, compacte et affûtée. Il a d’ailleurs comme pierres à aiguiser, de fidèles et excellents producteurs, de Zaytoven à Mike Will Made It, en passant par Metro Boomin et Southside, sans oublier Honorable C Note et Drumma Boy.

Son premier projet en tant que nouveau Gucci, Everybody Looking, semblait une première prise de conscience de sa nouvelle puissance, ou du moins d’une puissance enfouie. Majoritairement produit par Zaytoven et Mike Will Made It, et malgré quelques très bons titres, le projet n’avait pas séduit tous ses fans. Séparé de tous ses anciens vices, le rappeur aurait-il perdu tout son attrait cartoonesque ? A l’aide de Woptober, Gucci Mane a balayé une première fois tous ces soupçons et a confirmé son retour avec The Return of East Atlanta Santa. Sur ce projet, le trap god marche définitivement sur l’eau et dès la première track affirme sa capacité à délivrer des sons construits, intelligents, drôles, techniques et incroyablement catchy. Enfin, qui aurait prédit il y a quelques années un sourire aussi contagieux à l’occasion d’un mini-concert chez NPR accompagné d’un Zaytoven aussi décomplexé qu’un pianiste de saloon ? Longue vie au Gucci libre ! (George de la Maille x Tis)


Insomniac Lamb$ – Mid West Trappin’

Award de la meilleure playlist pour les drive by hivernaux.

Découvert sur le banger Clientele aux côtés de Maxo Kream, Lamb$ commence doucement à se faire un nom parmi les trappeurs en vogue au pays de l’oncle Trump. Même si Cincinnati se situe très loin de l’épicentre de la trap et qu’il y fait beaucoup plus froid, Lamb$ s’est fait bousiller par la musique d’Atlanta et émule ce style avec une efficacité destructrice. Et si Cam’Ron dit qu’il va la chercher en Ohio, c’est que la dope du Midwest doit être bonne. S’il est loin de réinventer la roue, Lamb$ est un jeune prospect prometteur du haut de ses 24 ans. Malgré le fait qu’il soit un brin fainéant quand il s’agit d’écrire un peu, d’alterner les flows ou d’articuler correctement. C’est de la motivation music pure, assez répétitive, mais toujours ultra percutante et très bien produite. Ça tape fort dans les murs, ça fatigue la nuque : la parfaite bande son pour les drive by hivernaux, avec des pneus neige, une doudoune North Face et un beamer blanc comme la poudre. (Mugen le Druide)


Jessie Reyez - Figures

Award du meilleur hymne post rupture

C’est l’histoire de Jessie Reyez, jeune chanteuse d’origine colombienne born and raised à Toronto. Avant Figures les seuls apparitions remarquées de la chanteuse ont été une collaboration avec King Louie et quelques covers sur sa chaine Youtube. Figures marque le début d’un rêve de carrière et la fin d’un cauchemar amoureux, une relation avec un ex menteur et infidèle. Et puisque l’amour vous empêche (souvent) de tirer directement une balle de calibre 12 dans le genou de votre ex-compagnon, quoi de plus beau que de se venger en chanson. Enfin beau à condition d’avoir le groove et la voix de Jessie Reyez, une voix écorchée vive qui nous rappelle parfois une Amy Winehouse ivre et sous l’effet de substances psychotropes. On est impatient de découvrir le premier EP de la jeune chanteuse qui devrait arriver début 2017. (Oscar Courvoisier)


Joe Blow - You Should Be Payin Me Too !!

Award du 13ème mois bien mérité

En 2015, le nom de Joe Blow était sur toutes les lèvres après que Nicolas Pellion ait, à juste titre, cité le rappeur d’Oakland comme l’une des influences majeures des frangins de PNL, lui conférant une renommée aussi soudaine qu’inattendue en France (on te voit Olivier C.) Malheureusement, cet engouement est retombé depuis et les projets de Blow, pourtant loin d’être dénués d’intérêt, sont passés sous le radar en 2016. On retrouve pourtant dans You Should Be Payin Me Too !! tout ce qui fait le charme du rappeur : un flow bavard, des featurings en pagaille (les Mob Figaz Fed-X et Husalah, mais aussi Philty Rich, Freeway ou Ampichino), des thématiques entre triomphe et drame de la rue, chaque piste étant fatalement hantée par le décès de l’ami et mentor The Jacka. Certes, le projet est trop long, certes le mix manque parfois d’énergie, mais l’honnêteté de Blow et la qualité des instrus en font un des incontournables de 2016, notamment grâce au tube Keep it 1000 ou au magnifique Not My Trap.
PS : La compil’ Featuring Joe Blow, Vol. 2 est aussi chaudement recommandée pour verser un peu de liqueur sur le sol en l’honneur de The Jacka.
PS2 : L’essentiel top de la Bay Area par Fusils A Pompe se télécharge gratis ici (Jocelyn Anglemort)


Joey Fatts & Vince Staples - Farrakhan

Award de la chanson ACAB 2016

Les émeutes de Ferguson, les étudiants parisiens bastonnés dans les manifs, les morts de Keith Lamont Scott ou d’ Adama Traoré, 2016 nous auront offert quelques bons motifs d’exaspération à l’encontre des forces de l’Ordre. Heureusement, le titre Farrakhan, issu du très bon I’ll Call You Tomorrow permet d’inverser le rapport de force, au moins pendant 3 minutes. Sur un sample du morceau Special Death de Mirah (popularisé par la série American Horror Story, un choix de circonstance), Fatts évoque pêle-mêle le crack dans les zones défavorisées, le traitement de la communauté noire post-Katrina, la religion et la vie de gang. En mêlant son texte à des samples de Louis Farrakhan, membre-dirigeant de Nation of Islam, c’est l’ensemble des puissants que Fatts allume. Là où YG ouvrait les hostilités avec le titre Police Get Away Wit Murder, Fatts rend ici une bonne fois pour toute la monnaie de leur pièce aux LAPD ripoux, notamment dans un très efficace climax en fin de clip. Et ça fait du bien. “Motherfuck C.R.A.S.H.(Jocelyn Anglemort)


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Introduction : Napoléon LaFossette
Illustration : rimrimrim


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