Entretien avec Sylvain Bertot autour du rap indépendant
Independant As Fuck
, le 15 mars 2017
Un long entretien en deux parties où Sylvain Bertot décortique la scène foisonnante du rap indépendant des années 2000 pour l’émission Black Mirror.
L’excellent éditeur Le mot et le reste fournit régulièrement les fondus de bon son en guides d’exploration fouillés, dans tous les styles, par les plus reconnus passionnés du genre. Le camarade Sylvain Bertot, de l’incontournable blog Fake For Real, s’apprête à y sortir le très attendu Mixtapes - Un format musical au cœur du rap. Vous pouvez trouver un avant-goût de son taf dans le dernier numéro d’iHH Magazine, seul mais digne rescapé de la presse hip-hop papier et auquel l’équipe Swampdiggers file d’ailleurs régulièrement un coup de patte (dossier $uicideboy$ dans le n°5, dossier Awful Records et notre best of 2016 dans le n°6, actuellement en kiosques). Mais le copain n’en est pas à son coup d’essai : outre le très recommandable Rap, hip-hop, Trente années en 150 albums, de Kurtis Blow à Odd Future sorti en 2013, il nous a surtout gratifié en 2014 d’un passionnant et nécessaire Rap indépendant, La vague hip-hop indé des années 1990-2000 en 30 scènes et 100 albums (on en parlait ici).
Alors certes, c’est un bouquin pointu qui n’échappe pas à un name-dropping effréné, mais il faut bien rendre justice à tous les acteurs, même obscurs, de cette "vague" née en opposition au rap grand public et formaté qui prospérait dans les années 1990, soupe insipide soumise aux exigences d’un marché florissant. La scène "indé", foisonnante et irrespectueuse, a décidé d’emmerder les clichés et de faire exploser les frontières du rap : sociales, raciales, esthétiques. Un réseau de labels, de radios, de sites webs, de salles de concerts s’est peu à peu mis en place pour se développer en dehors des majors. Une micro-révolution musicale, qui s’est attachée à garder en vie l’esprit du hip-hop originel tout en le projetant dans le futur à grands renforts de samples SF ou folk-rock et de délires ésotériques. Et une manière de se diffuser qui préfigure largement l’explosion du "rap de niche" sur le net (notre cher vivier Phonk, notamment).
Une bonne manière d’entrer dans le bouquin et de défricher ce joyeux bordel, c’est d’écouter cette discussion avec Sylvain Bertot dans Black Mirror – une émission sur l’histoire sociale des musiques Noires qu’on vous conseille par ailleurs chaudement –, joliment agrémentée des grands classiques de la mouvance. La première partie s’attache aux précurseurs new-yorkais du mouvement, de Company Flow au label Rawkus, et leurs successeurs de la Côte est. La deuxième partie arpente les autres États, en particulier la région de la baie et sa turbulente scène issue des soirées freestyle du Good Life Café de South Central, dont le fameux Project Blowed qui y émergea. On y cause aussi des Blancs de la cambrousse qui se mettent au rap et inventent une nouvelle source d’authenticité hip-hop, loin de la street ou du purisme : la sincérité.